Dr Thioly-Bensoussan

Dermatologue

Le soleil : bénéfique quand même ?

Je n'insisterai pas sur le bien-être physique et psychologique provoqué par le grand air, la douce chaleur du soleil sur notre corps dénudé : le soleil détend, favorise le sommeil et l'équilibre.
Des scientifiques ont démontré l'existence d'une hormone sécrétée par l'épiphyse, appelée mélatonine, qui détend et fait dormir. On est souvent bien plus détendu en été qu'en hiver et rappelez-vous le nombre de gens autour de vous qui disent "ce temps gris me déprime" ; un petit rayon de soleil, et l'humeur vire au rose.
Le soleil a un autre pouvoir essentiel : celui de transformer les stérols de la peau en vitamine D, la vitamine anti-rachitique qui permet la fixation du calcium sur l'os.

Le soleil : en user sans en abuser, c'est bronzer sans rides

Le soleil est le siège de réactions thermonucléaires et produit un intense rayonnement électro­magnétique, irradiant à travers l'espace dans toutes les directions. En ce qui concerne la lumière, cette énergie se répartit en :

Le rayonnement solaire

Le rayonnement solaire qui parvient à la surface de la terre est considérablement modifié par son passage à travers l'atmosphère. En effet, la terre est entourée d'un bouclier sans lequel la vie n'y serait pas possible : il s'agit de la couche d'ozone, située dans la stratosphère à une altitude de 15 à 20 km, qui stoppe les rayonnements meurtriers en provenance de l'espace et dont nous sommes constamment bombardés : les UV C, composantes les plus "dures" du rayonnement solaire, c'est-à-dire à longueurs d'onde les plus courtes, qui sont mortels (ce sont ces UV C que l'on utilise en salle d'opération pour la stérilisation).
La barrière d'ozone, qui fait la une de l'actualité, représente donc un facteur de protection essentiel, et la découverte récente qu'elle comporte des trous au-dessus des pôles et que son épaisseur totale diminue chaque année de façon sensible a conduit les principaux pays developpés à réunir une conférence pour étudier les causes de ce phénomène inquiétant et trouver les moyens d'y remédier. Les facteurs mis en cause sont essentiellement les CFC (chloro-fluo-carbonates, ou fréon), utilisés dans les systèmes de réfrigération et comme gaz propulseurs des aérosols et vraisemblablement aussi les gaz de combustion des jets volant à très haute altitude. Selon certaines estimations, une diminution de 1% de la couche d'ozone entraîne une augmentation de 3,5% des cancers cutanés, car plus cette couche s'amincit, plus grande sera la proportion d'ultraviolets dangereux à atteindre la surface de la terre. Ce sont les UV B qui sont impliqués dans la génèse des cancers cutanés.

a. L'ensoleillement

Il faut savoir que la quantité d'ultraviolets varie :

b. Pénétration du rayonnement solaire dans la peau

Il est important de bien comprendre ce mécanisme, car il est la clé de la prévention du vieil­lissement et du cancer cutanés et permet de mettre au point des méthodes de bronzage en douceur, sans danger.

c. De quelle protection naturelle disposons-nous contre ces UV ?

Les espèces du monde animal sont protégées contre l'agression solaire par des poils, des plumes ou des écailles.
La peau humaine ne dispose pas de ces protections (si l'on excepte les cheveux qui protègent efficacement le cuir chevelu, très exposé chez le bipède qui inaugura la station debout), mais elle se défend de façon tout à fait originale, et unique dans le monde animal, par la sécretion de mélanine : il s'agit d'un pigment fabriqué par des cellules spécialisées de l'épiderme, les mélanocytes, sous l'action conjuguée des UV A et des UV B.
Cette mélanine élaborée sous forme de petits grains dans la couche la plus profonde de l'épiderme va migrer vers la surface et s'étaler sur toute la hauteur de l'épiderme, empêchant ainsi les UV d'atteindre les niveaux profonds où ils exerceraient leur action destructrice.
Le nombre de mélanocytes est à peu près égal chez tout le monde, mais la qualité et la quantité de pigments qu'ils sécrètent est, elle, très variable. Il s'écoule de 48 et 72 heures entre l'exposition solaire et l'apparition du bronzage protecteur : c'est là une période pendant laquelle la peau n'est pas vraiment armée contre l'agression solaire.
Le bronzage obtenu sera fonction du "phénotype" de chacun, qui détermine de façon innée la couleur des yeux, de la peau, des cheveux (cf. tableau) et la qualité et la quantité de mélanine dont on dispose.

Phototypes
Phototype Cheveux Peau Taches de rousseur Coup de soleil Bronzage
0 Blancs Albinos 0 Constant +++ 0
I Roux Laiteuse +++ Constant ++ 0
II blonds Claire ++ Constant + Hâle léger
III A blonds Claire + Fréquent + Hâle clair ou foncé
III B Châtains Mate + Fréquent + Hâle clair ou foncé
IV Bruns Mate 0 rare Foncé
V Méditerranéen Bruns Mate 0 exceptionnel Foncé
VI Noir Noirs Noire 0 Jamais Noir

Nous ne sommes donc pas égaux face au soleil, et il serait ridicule et dangereux de vouloir être aussi bronzé qu'une méditerranéenne quand on est une rousse à peau laiteuse !

d. La protection solaire

Quand on pense que la peau du front d'un sujet noir doit subir pendant 80 ans les mêmes conditions d'ensoleillement pour développer des altérations dermiques équivalentes à celles d'un sujet blanc de 20 ans, on peut imaginer que vouloir bronzer, c'est bien, mais que de bronzer en se protégeant, c'est mieux encore. Pour bronzer "sagement", il suffit de respecter quelques règles de bon sens : - éviter le soleil entre 12 et 14 heures (heures solaires réelles, soit 14 et 16 heures à l'horaire d'été en vigueur en France) - ne pas rester couché immobile en plein soleil - l'exposition doit être progressive, et cela d'autant plus que la peau est claire et que l'on veut mieux en prévenir le vieillissement.

Comment s'y retrouver dans les indices solaires ?

Au départ, les indices de protection (ou IP) en vigueur en Europe allaient jusqu'à 100 (100 représentant la protection maximale totale)
Or maintenant les indices européens vont jusqu'à 50 , cette IP étant la protection maximale. On trouve en pharmacie des écrans totaux en crème, en fluide extrême, en lait spray, en gel, en stick, tous ces produits étant peu visibles et tres cosmétiques (Anthélios , Bioderma, Eucerin, SVR).
Il faut savoir qu’habituellement, les gens n’utilisent que la moitié de la quantité nécessaire pour une pleine protection. La quantité recommandée est 2 mg/cm2 de peau, ou 30 ml (2 cuillères à soupe) pour tout le corps, ou 2,5 ml (1/2 cuillère à café) pour un bras. Des études publiées indiquent que la quantité généralement utilisée est beaucoup moindre.
Comme le montre le tableau, on a défini des phototypes qui classent les différents types de peaux selon leur couleur, de la peau blanche et laiteuse avec taches de rousseur (la peau de l'Anglaise-type) jusqu'au brun mat. On comprend que les protections à s'appliquer vont varier en fonction du type de peau et des conditions d'exposition.
En général pour brunir sans souffrir de brûlures ni sans trop s'abimer la peau, il faut savoir respecter certaines règles :

Les produits de protection solaire sont présentés sous différentes formes, qui ne relèvent pas que d'une différence de fluidité ou d'un caractère plus ou moins gras. Alors quelle texture adopter ?

Il convient d'appliquer ces crèmes de façon correcte : 2 couches pour avoir un volume correct ,une heure avant l'exposition solaire, pour donner au produit le temps d'imprégner toute la couche cornée, et répéter les applications toutes les 2 heures, ainsi qu'après chaque bain ou douche. Ne pas hésiter à recourir à un écran total waterproof bien gras, si l'on fait de la planche à voile ou tout autre sport aquatique ou carrément un T-shirt !

Si malgré toutes ces précautions vous avez un coup de soleil : Sachez donc profiter des progrès de la médecine et de la cosmétologie pour bronzer intelligemment en vous protégeant par des filtres UV A et UV B.

e. Que penser des auto-bronzants ?

Les auto-bronzants : s'ils vous permettent de moins vous exposer et de vous protéger ainsi des effets nocifs du bronzage répété, pourquoi pas ?
Ils contiennent du DHA, une substance chimique que se combine avec les protéines épidermiques pour colorer la peau sans danger. Le seul problème est que, malgré l'amélioration cosmétologique des auto-bronzants depuis le TAN-O-TAN des années 60, la couleur qu'ils permettent d'obtenir n'est pas toujours idéale, trop jaune ou trop foncée.
Il ne faut pas hésiter à les tester les uns après les autres en attendant à chaque fois quelques heures pour voir si la couleur qu'ils donnent à votre peau vous convient, et renouveler les applications si besoin. Mais attention, il est impératif de bien se laver les mains après l'application sous peine de se retrouver avec des paumes colorées, ce qui ne fait pas très naturel, il faut savoir qu'ils peuvent tacher les vêtements ; il ne faut pas trop en mettre sur les sourcils et les endroits du corps où la peau est plus épaisse (coudes, genoux, chevilles, talons), ils y feraient des placards foncés. Parfois enfin, le produit s'accumule dans les bouchons cornés des pores du nez pour y donner un aspect artificiel.
L'effet le plus satisfaisant est obtenu en mélangeant à part égale son lait corporel habituel avec l'auto-bronzant et l'appliquer le soir avec éventuellement 1 ou 2 couches de plus si la couleur obtenue n'est pas assez foncée.
Certains produits appelés "prolongateurs de bronzage" sont en fait des auto-bronzants contenant du DHA.

f. Quant aux UV A en cabine ?

D'accord pour "préparer" sa peau, c'est-à-dire induire non pas un bronzage, mais une production de mélanine infime qui permettra à la peau d'être moins vulnérable au soleil. Cette préparation est même recommandée pour les peaux très claires à raison de 2 séances par semaine pendant 3 semaines. Un protocole plus poussé et pratiqué par les dermatologues associe UV A et psoralènes (PUVA) pour la protection contre les allergies solaires, mais c'est plus du domaine médical.
Sûrement à proscrire pour entretenir un bronzage tout au long de l'année et vieillir sa peau prématurément.